mardi 31 mai 2016

13.

Et cette éponge qui se ramollit de jus de vaisselle comme la mousse s’attendrit de pluie, déborde sous la rosée d’un robinet trop plein... gît, gorgée, engorgée, le flanc colonisé d’écume grasse... on l’écrase, alors elle bave dans un grincement de salive sous la langue. Je grimace. L’éponge agonisante, visqueuse, flasque, molle dans le fond de l’évier, vit sans amour et d’eau, sans dessous de tables, de lait qui a mal tourné et de culs de cocottes salement culottés... Elle pourrit de miettes dans les pores de sa peau. Je respire dans mes doigts. Et l’éponge séduit une mouche qui hésite en va et en vient entre elle et la poubelle... Je m’essouffle en inspirations saccadées qui tentent d’éviter mon nez. L’éponge pue l’oubli, embaume la cuisine, la maison, le jardin, le monde entier... 
- Vous resterez bien diner ? M’offre soudain mon hôte. Son haleine perfore mon dégoût d’un parfum de menthe bleue. Il suce une pastille. Il est enrhumé.

Jane Véronique

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