vendredi 13 mai 2016

5.

Philibert Papillon ? Je l’ai bien connu. Nous rentrions à reculons ensemble de l’école. Il partageait avec moi ses beurres de tartine du goûter. Il n’avait pas beaucoup de copains, mais moi je l’aimais bien. Il s’habillait devant derrière et parlait d’une drôle de façon. Nous jouions à cache-cache le mercredi. À cache-cache, en vrai, il inversait les mots, mais je le comprenais, c’était mon ami. On se trouvait toute l’après-midi, je me montrais derrière le gros chêne, il ne me cherchait jamais... Il s’en fichait parce que l’important est de gagner. Il m’invitait souvent à arpenter sa maison en marche arrière un miroir dans les bras pour flâner au plafond... on enjambait les lustres, on surveillait ses parents par terre sans qu’ils ne s’en rendent compte. Puis on a grandi. On allait boire du Cola Coca dans de grandes pailles avec des verres coudés qu’on faisait tourner pour pleurer. Il me récitait des poèmes en commençant par la fin. Et un jour, dos à dos, on s’est embrassés...
Je ne l’ai jamais revu. Il paraît qu’il a trouvé un petit boulot dans l’industrie laitière.

Jane Véronique

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